Le babélisme ne devrait plus être considéré comme une malédiction divine mais plutôt comme un obstacle que l'homme peut gaillardement affronter comme il le fait très souvent pour bon nombre de défis auxquels il a à faire face. Cela exige évidemment qu'il prenne conscience de ses corollaires. C'est dans cette optique que nous avons jugé bon d'intervenir pour proposer une solution aux problèmes résultant du multilinguisme inextricable de la région des Grands Lacs africains. Dans cette partie de l'Afrique subsaharienne, on ne devrait pas rester les bras croisés devant la diversité linguistique qui entretient une situation nuisible à l'épanouissement des populations de différents États qui préfèrent fonctionner en langues étrangères, coloniales, minoritaires, élitistes et difficiles d'accès. La gestion des projets et des relations à caractère coopératif et développemental de même que les droits et libertés politico-linguistiques avec toutes leurs ramifications sont mis en péril. L'unité linguistique basée sur une langue locale, non ethnique, facile d'accès et, partant, populaire, pourrait contribuer à résoudre un certain nombre de problèmes qui pèsent sur cette région de façon ostensible ou sous-jacente.
Dans ce travail, nous avons réuni les éléments théoriques devant motiver la sélection d'une langue à promouvoir pour endiguer un certain nombre de problèmes reliés au multilinguisme en général. Appliqués à la région des Grands Lacs africains, ces éléments ont montré que le swahili serait mieux indiqué. Les résultats des éléments théoriques ont dû être complétés par des données empiriques résultant des attentes et des aspirations des habitants de la région qui vivent au jour le jour les conséquences inéluctables de la diversité linguistique. Ces données ont révélé que la véhicularité du swahili est satisfaisante mais que, par contre, sa fonctionnalité est réduite. C'est pourtant la fonctionnalité d'une langue qui en assure la vitalité et l'expansion. Compte tenu de cette situation, nous avons proposé des stratégies à court, à moyen et à long termes aux décideurs qui, mieux que par le passé, devraient accorder un intérêt particulier à une langue locale de grande expansion, le swahili en l'occurrence. Conscients de l'importance de cette langue sans cachet ethnique, les décideurs sont unanimes quant au soutien indéfectible à sa promotion car, sur le plan régional, le swahili pourrait favoriser l'établissement de véritables rapports humains. Nous croyons que l'établissement de ces rapports pourra amorcer le processus d'unification car pour que les gens s'entendent, il faut d'abord et avant tout qu'ils entendent.