Cette étude a tenté d'analyser d'un point de vue historique le rapport des femmes ivoiriennes à la politique moderne et les diverses attitudes et comportements qui en découlent. Il s'agissait de saisir la perception qu'ont les femmes de la politique en tant que "direction des affaires de l'État" et leur place dans la sphère politique.
De l'analyse des récits de vie d'une vingtaine de femmes et de l'observation directe des comportements et attitudes des femmes face au coup d'État militaire qui a eu lieu le 24 décembre 1999 en Côte d'Ivoire, il ressort que les femmes ivoiriennes sont moins attentives à la politique que les hommes. Elles la rejettent dans sa forme et dans ses pratiques. En effet, écartées du processus de socialisation politique moderne (1945-1960), elles ne disposent toujours pas d'outils nécessaires pour participer à la vie politique. Représentée comme un jeu et un espace exclusivement masculin, la politique apparait comme un espace étranger à l'espace féminin. Les pratiques de cette politique ne répondent pas à leurs critères de la féminité qui se vit comme une fonction sociale, voire une mission. L'idéal féminin dominant est celui d'une femme mariée assumant effectivement son rôle de femme au foyer et de mère. Pour accéder au jeu et à l'espace politique, les femmes sont contraintes dans une certaine mesure de renier leur féminité et de se transformer symboliquement en hommes honoraires. En règle générale, elles préfèrent laisser cet espace aux hommes sacrifiant à la division sexuelle des tâches sociales.
Elles investissent des lieux de pouvoir moins formalisés, tels que, les associations, les groupements agricoles, les oeuvres de charité. Dans ces lieux, elles parviennent à synchroniser et à harmoniser leurs fonctions premières de femmes avec d'autres tâches sociales. Elles s'y forment, s'informent et établissent un dialogue, parfois, un rapport de force avec le pouvoir politique. Elles y puisent les instruments de leur participation et constituent des groupes de pression pouvant influer les décisions du cercle de gouvernement. Contrairement aux hommes qui abordent le métier politique dans un esprit de carrière personnelle, dans leur grande majorité, les femmes ont plutôt, une vison utilitariste de la politique.